
Un samedi matin à Paris, devant la vitrine de Benoît Castel, le parfum du pain au levain se mêle à celui d’un pudding doré aux fruits secs. Le boulanger salue les habitués par leur prénom et n’hésite pas à expliquer que ce dessert a été préparé… avec le pain invendu de la veille.
« Rien ne doit finir à la poubelle », dit-il avec un sourire. Cette phrase résume son état d’esprit : transformer chaque reste en nouvelle gourmandise.
Son combat contre le gaspillage est né d’un constat simple : des tonnes de pain et de viennoiseries jetées chaque jour alors qu’elles pourraient nourrir et inspirer.
Un parcours marqué par le goût et par le sens
L’enfant de Normandie devenu pâtissier des grands
Né à Caen en 1973, Benoît Castel découvre très tôt le plaisir de cuisiner à la maison. Après un CAP pâtissier, il débute chez Fauchon, temple de la pâtisserie créative, puis rejoint les cuisines d’Hélène Darroze.
Ces premières années lui enseignent la rigueur et l’exigence esthétique, qu’il approfondit ensuite en devenant chef pâtissier de la Grande Épicerie de Paris, l’une des adresses les plus prestigieuses de la capitale.
Le choix du retour aux essentiels
En 2013, à quarante ans, il quitte l’univers feutré de la haute pâtisserie pour retrouver un artisanat plus sincère et plus proche des gens. Il ouvre sa première boulangerie dans le 20ᵉ arrondissement de Paris, un quartier populaire, et décide d’y proposer du pain au levain, des tartes de saison, des gâteaux simples mais généreux.
Ce virage n’est pas qu’une affaire de style : il veut prouver qu’on peut allier goût, convivialité et responsabilité.
Une philosophie : gourmandise et éthique
Peu à peu, Benoît Castel fait de son fournil un laboratoire d’anti-gaspi : il choisit des farines bio, des œufs fermiers, des fruits locaux, limite les emballages et, surtout, réinvente chaque reste.
Sa démarche éveille l’intérêt des clients : on vient autant pour le pain croustillant que pour les recettes futées qui donnent une seconde vie aux invendus.
L’anti-gaspi comme moteur de création
Redonner du sens au pain rassis
Chez Benoît Castel, le pain de la veille n’est jamais perdu. Il devient :
- un pudding moelleux agrémenté de fruits secs et d’épices,
- du pain perdu gratiné au four, caramélisé et croustillant,
- de la chapelure maison pour gratins et panures.
Il aime rappeler que ces recettes sont à la portée de tous : « Ce n’est pas de la récup’ triste, c’est une autre façon de cuisiner. »
Transformer les viennoiseries oubliées
Croissants et brioches trop secs pour être vendus se transforment en desserts réconfortants. Castel propose par exemple :
- un gratin de croissants imbibés d’une crème aux œufs,
- un clafoutis enrichi de brioche émiettée,
- un crumble fruité utilisant des restes de cake.
Ces recettes évitent le gaspillage et apportent des textures et des saveurs inattendues.
Sublimer les fruits trop mûrs
Benoît Castel affectionne particulièrement les fruits « fatigués », qu’il considère comme les plus parfumés. Il les cuit doucement en compotes sans sucre ajouté, en tartes rustiques, en confitures express ou en coulis pour ses yaourts maison.
Il explique souvent que les fruits abîmés concentrent le goût : « La nature fait déjà une partie du travail pour nous. »
Les conseils de Benoît Castel pour les boulangers maison
Bien conserver pour mieux profiter
Le premier geste anti-gaspi est de conserver correctement le pain et les ingrédients. Castel conseille :
- d’envelopper le pain dans un linge ou une boîte à pain en bois plutôt que dans du plastique,
- de trancher et congeler le surplus dès le premier jour,
- de stocker les farines, fruits secs et graines dans des bocaux hermétiques.
Ces habitudes prolongent la durée de vie des produits et limitent les pertes.
Adapter ses achats aux saisons
Benoît Castel recommande d’acheter les fruits au rythme des saisons et de les cuisiner rapidement. Les produits de saison sont moins chers, plus goûteux et moins sujets au gaspillage.
Il insiste aussi sur l’importance d’utiliser les bonnes quantités de farine et de levain, afin d’éviter les surplus qui sèchent inutilement.
Instaurer le réflexe du recyclage culinaire
Il encourage chacun à instaurer à la maison un “jour des restes”. Cette routine consiste à rassembler pain sec, viennoiseries et fruits un peu mûrs pour préparer un dessert ou un plat convivial.
Ce rituel développe la créativité et fait prendre conscience de la valeur de chaque ingrédient, même fatigué.
Un artisan qui change notre regard sur le pain
Gourmandise et responsabilité main dans la main
Benoît Castel montre qu’un artisan reconnu peut réconcilier écologie et plaisir. Ses clients découvrent qu’un pudding au pain rassis ou une tarte aux fruits cabossés peut être aussi savoureuse qu’un dessert classique.
Faire revivre les recettes familiales
Sa démarche remet à l’honneur les desserts de nos grands-mères : pain perdu, pudding, confitures de restes…
Ces préparations simples redonnent un sens émotionnel au métier : le pain redevient un aliment à transmettre et à transformer, pas un produit jetable.
Une vision durable de la boulangerie
En remettant en avant le recyclage culinaire et le respect des saisons, Benoît Castel prouve qu’une boulangerie durable est possible en ville.
Pour les boulangers maison, il ouvre des perspectives : moins jeter, plus inventer, et cuisiner autrement ce qu’on croyait perdu.
Goûter sans gâcher : une nouvelle tradition à inventer
L’histoire de Benoît Castel rappelle que la créativité naît souvent de la contrainte : utiliser ce qu’on a, valoriser ce qui reste. Son parcours, de la pâtisserie de luxe à la boulangerie de quartier, montre qu’on peut réconcilier gourmandise, bon sens et respect des ressources.
Pour les amateurs de pain et de gâteaux, il transmet un message simple : avant de jeter, regardez autrement votre pain sec, vos fruits trop mûrs, vos viennoiseries de la veille…
Ces ingrédients sont le point de départ de nouvelles recettes et d’un mode de consommation plus juste. À travers ses gestes et ses idées, Benoît Castel redonne au métier son rôle fondamental : nourrir sans gaspiller, avec inventivité et humanité.
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