Comprendre la fermentation du pain : levure vs levain

Comprendre la fermentation du pain : levure vs levain

Je repense souvent à la première fois où j’ai mis la main à la pâte dans ma cuisine : je voulais préparer un pain maison rapide et j’ai opté pour la levure boulangère sans trop réfléchir. Le résultat était tout à fait convenable, mais j’ai vite ressenti l’envie d’aller plus loin et de découvrir le levain...

C’est à ce moment que j’ai compris que la fermentation du pain est au cœur de toutes les saveurs et textures que l’on peut obtenir. Beaucoup se demandent ce qui différencie la levure du levain, et comment choisir. J’ai moi-même tâtonné pendant un bon moment en testant toutes sortes de variantes.

Voici donc ce que j’ai appris au fil de mes expériences et des conseils glanés auprès d’autres artisans : le rôle précis de la levure et du levain, ainsi que les avantages et inconvénients de ces deux méthodes de fermentation pain.

Les fondamentaux de la fermentation

La fermentation est le processus par lequel les micro-organismes transforment les sucres de la farine en gaz (dioxyde de carbone), en acides et en arômes. Ce sont ces gaz qui font lever la pâte, créant cette mie légère et aérée que l’on apprécie tant. Les acides et les composés volatils, quant à eux, influencent directement le goût et la consistance finale du pain.

Dans le cas d’un pain à la levure, la fermentation est principalement assurée par des souches de Saccharomyces cerevisiae. Quand on utilise un levain, on a affaire à un écosystème plus complexe, composé de bactéries lactiques et de levures sauvages.

J’ai souvent remarqué que plus la fermentation est longue et contrôlée, plus le pain acquiert des saveurs profondes. Certains jours d’hiver, je laisse fermenter ma pâte au frais pendant 12 heures : le lendemain, la miche que j’obtiens a un parfum inimitable et une structure différente de celle façonnée en quelques heures seulement.

Travailler avec la levure boulangère

La levure boulangère, qu’elle soit fraîche ou sèche, est la méthode la plus répandue pour faire lever la pâte. Elle est facile à trouver, relativement simple d’utilisation et permet d’obtenir rapidement un pain gonflé.

Les avantages

Le principal atout de la levure réside dans la rapidité de la fermentation. Une pâte à la levure peut lever en une à deux heures selon la température ambiante. Cela se révèle pratique pour ceux qui n’ont pas trop de temps devant eux ou qui veulent s’initier à la boulangerie sans trop de complexité.

Autre avantage, la levure est plus prévisible : les souches de levure boulangère sont sélectionnées pour offrir une régularité dans les temps de pousse. Lorsque je prépare des baguettes pour un brunch entre amis, je sais que je peux compter sur ce résultat quasi sûr, sans surprise particulière.

On trouve aussi assez facilement de la levure fraîche (en cubes) dans les boulangeries ou de la levure sèche (en sachets) dans les supermarchés. C’est un produit abordable et qui se conserve assez bien, surtout la version déshydratée.

Les inconvénients

En revanche, un pain à la levure peut manquer de complexité aromatique. Certaines personnes disent trouver ce type de pain un peu trop neutre en bouche. Pour ma part, j’ai noté qu’il est plus difficile d’obtenir des notes acidulées ou de fruits secs avec ce mode de fermentation, sauf si on prolonge la pousse au frais plusieurs heures.

Autre point : si on ne respecte pas scrupuleusement les dosages et la température de l’eau, la levure peut s’affaiblir ou, au contraire, trop agir et faire s’effondrer la pâte. Pour un résultat optimal, mieux vaut bien peser la levure et vérifier que l’eau n’est pas trop chaude (au-delà de 40 °C, les levures meurent).

Miser sur le levain naturel

Le levain, c’est un peu la méthode ancestrale, celle qui préexistait à l’industrialisation de la levure. Il se prépare à partir de farine et d’eau, fermentées naturellement dans un bocal, et constitue un véritable écosystème de levures sauvages et de bactéries lactiques.

Les avantages

Le goût est sans doute le premier argument en faveur du levain. On obtient un pain à la croûte plus épaisse, à la mie plus alvéolée (selon l’hydratation de la pâte), et surtout à l’arôme plus complexe, avec parfois des notes légèrement acidulées que beaucoup apprécient. Plusieurs de mes clients me disent qu’une fois qu’on a goûté un pain au levain, on a du mal à revenir à la levure traditionnelle.

Sur le plan nutritionnel, le levain est également réputé pour faciliter la digestion et abaisser l’index glycémique du pain. Les bactéries lactiques présentes dans le levain contribuent à mieux dégrader les sucres et les protéines de la farine. Certaines personnes intolérantes aux pains classiques supportent mieux le pain au levain, même si cela varie selon les sensibilités individuelles.

En outre, entretenir son levain maison crée un vrai lien avec le pain qu’on prépare. J’ai ressenti un petit frisson la première fois que j’ai vu mon levain “buller” dans son bocal, signe qu’il était vivant. C’est presque comme avoir un petit compagnon à nourrir et à surveiller.

Les inconvénients

Le levain demande plus de temps et d’attention. Il faut compter plusieurs jours pour le créer de zéro. Ensuite, il requiert des rafraîchis réguliers (ajouts de farine et d’eau) pour le maintenir actif. Si on le délaisse trop longtemps, il peut s’affaiblir voire mourir.

La fermentation d’une pâte au levain est aussi plus longue. Il n’est pas rare de laisser la pâte lever pendant 6, 8, voire 12 heures, selon la température et la force du levain. Cela peut être compliqué à caser dans un emploi du temps chargé, et il est parfois plus difficile de prévoir l’heure de cuisson exacte.

Le résultat peut varier selon l’humeur du levain. Par temps chaud, le levain peut être plus actif ; par temps froid, il se met en veille prolongée. On doit alors ajuster les temps de fermentation, la quantité de levain, etc. C’est un apprentissage qui demande de l’observation et un certain doigté.

Comment choisir entre la levure et le levain

La décision se fait surtout en fonction de vos envies et de votre disponibilité. Pour un pain du quotidien, rapide à mettre en œuvre, la levure boulangère fait très bien l’affaire. Elle se trouve partout, sa fermentation est rapide et elle assure une régularité appréciable, notamment si vous cuisinez en semaine.

Si vous cherchez un goût plus complexe et que vous aimez prendre le temps d’expérimenter, le levain est sans doute fait pour vous. Vous aurez l’opportunité de façonner un pain unique, dont le caractère évolue selon la farine et les conditions climatiques. On ressent souvent une certaine fierté à sortir son pain au levain du four, comme une petite victoire personnelle sur le temps et la nature.

Je recommande aussi la voie intermédiaire qui consiste à mélanger un peu de levain et un peu de levure. Ainsi, on gagne en saveur tout en réduisant la durée de fermentation. Cela permet de se familiariser progressivement avec le levain sans subir toutes les contraintes associées.

Le choix dépend donc de ce que vous recherchez : efficacité et simplicité ou caractère et aventure. Dans les deux cas, la fermentation est la clé d’un pain réussi, et le meilleur moyen de progresser est de tester les deux approches. Vous verrez qu’en prenant quelques notes et en restant attentif aux réactions de la pâte, il est possible d’obtenir d’excellents résultats, que ce soit avec la levure ou le levain.

Et finalement, rien ne vous empêche de switcher selon les occasions. Certaines semaines, je me contente de faire un pain à la levure pour gagner du temps. D’autres fois, je ressors mon bocal de levain chéri pour créer une miche digne des fournils d’antan. L’essentiel, c’est de comprendre que les deux méthodes ont leur place dans la panoplie du boulanger amateur ou confirmé.